dimanche 12 octobre 2014

Lundi 30 septembre 2013 : Lavacolla – Santiago de Compostela.

L’ultime étape.
Chez les pèlerins, « beaucoup songent au chemin parcouru avec la joie de toucher au but, d’autres sentent leur gorge se nouer à l’approche du dénouement » (dixit le guide du Camino francés de Jean-Yves Grégoire). Les marcheurs ou les cyclistes qui me doublent ont cessé de dire « buen camino ».
Derniers instants de calme. Après le hameau de Villamaior, le sentier grimpe au Monte do Gozo (370 m). C’est la colline qui surplombe Saint-Jacques-de-Compostelle. Depuis le site, on pourrait admirer la ville de Santiago, si le rideau d’arbres ne bouchait partiellement la vue.
Au Moyen Age, les pèlerins s’y écroulaient de soulagement et de joie devant les multiples dômes des églises de Santiago. Aujourd’hui, on y trouve un monument moderne (monolithe représentant Jean-Paul II), la chapelle San Marcos, ainsi qu’un inévitable magasin de souvenirs. Un refuge de pèlerins, gigantesque complexe, y fait suite.


A partir de là, le Camino descend tout droit vers la ville sainte, emprunte des escaliers et débouche sur des entrelacs d’autoroutes, de voies rapides et de voies ferrées.
J’entre à Santiago de Compostela en suivant l’antique itinéraire des pèlerins. Je parcours l’avenida de los Concheiros jusqu’à la calle de San Pedro. Je fais une halte pour boire un verre de cidre dans un bar.
A cet embranchement, je retrouve Viviane, garée tant bien que mal dans un tout petit espace où elle a eu un mal fou à se garer, vu la circulation infernale dans la ville. Bien sûr, c’est moi qui vais devoir sortir de ce trou…
Nous allons nous installer avec le fourgon au camping As Cancelas, sur les hauteurs de la ville : un camping ombragé, sur des terrasses, mais aussi très onéreux.

A pied, Viviane et moi rejoignons, sans le sac à dos, le parcours du Camino francés pour pénétrer en ville. Nous parcourons la calle de San Pedro, en plein travaux, et nous dirigeons vers le centre jusqu’à la Puerta del Camino (« Porta do Camino », en galicien). La vieille ville de Santiago se dévoile. On atteint la « praza de Cervantès ». Le granite gris orne les façades des édifices, les dalles des ruelles, les fontaines et les statues. On arpente la rua Acibecheria et la via Sacra. Quelques marches, et nous passons sous un porche : les pèlerins sont accueillis au son de la cornemuse par des musiciens de rue. 


L’émotion va grandissant jusqu’au débouché sur l’immense place de l’Obradoiro et la cathédrale, devant la statue triomphante de saint Jacques le Majeur.  Ici se termine le Camino francés, sentier de Saint-Jacques-de-Compostelle.



                                                                      

La cathédrale primitive fut édifiée par Alphonse II au début du IXe siècle juste après la découverte de la sépulture de saint Jacques. Elle sera détruite par Almanzor en 989. En 1075, commence la construction de la basilique romane qui subira au fil des siècles de nombreux rajouts.
Aux XVIIe et XVIIIe siècles, l’architecture baroque transforme littéralement la cathédrale et la ville pour leur donner l’aspect que nous connaissons aujourd’hui.

La praza de Obradoiro est envahie de touristes, de pèlerins et routards de toute sorte, à deux ou quatre pattes.

       

Au nord de la place, l’ancien hôpital des pèlerins construit par les Rois Catholiques au XVe siècle est devenu l’un des plus célèbres et luxueux « paradores » d’Espagne.


Il est midi. Nous entrons dans la cathédrale, bondée. C’est l’heure de la messe des pèlerins.


Nous en ressortons discrètement, prévoyant d’y revenir après le repas.
Nous mangeons dans une taverne, dont l’adresse nous est fournie par le Guide du Routard. « Maria Castaña » est une longue taverne rustique avec de grosses tables en bois. On y déguste des calamars grillés avec un verre d’albariño, un vin blanc fruité.
Par la suite, nous retournons sur la praza de Obradoiro.


Nous pénétrons dans la cathédrale. On y découvre le magnifique porche de la Gloire et sa scène de l’Apocalypse, façade originelle de la cathédrale qui ne se voit plus que de l’intérieur car aujourd’hui masquée par la façade baroque. Sous l’ample nef, le regard est attiré par le retable principal, étourdissant de richesse, ronflant de dorures. Le « botafumeiro », encensoir géant en argent qui voltige pour les grandes célébrations, est accroché à la clef de voûte de la croisée du transept.



On gagne la crypte où sont exposées la chasse et les reliques présumées de l’apôtre, puis on s’installe dans la file d’attente pour pénétrer dans la niche baroque à l’intérieur du maître-hôtel. En haut des quelques marches, le but ultime du pèlerinage est atteint : les pèlerins embrassent le buste de saint Jacques, et un triste ecclésiastique leur remet un certificat moyennant une obole ! Nous nous dispensons de l’embrassade et de l’obole…

Dans l’après-midi, nous allons flâner dans les ruelles de la vieille cité qui regorge de richesses, où l’on admire l’harmonie remarquable de la ville. Parapluies ou vestes imperméables sont de rigueur !
                       

Nous faisons une pause au café Casino, l’ancien casino de la ville, classé Patrimoine historique, où l’on peut se vautrer dans de vieux fauteuils pour écrire nos cartes postales tout en dégustant du cidre.
Nous nous rendons à l’Office des pèlerins. C’est là que les pèlerins viennent enregistrer leur credencial et obtenir la « compostela », attestation officielle de l’authenticité de leur pèlerinage : il suffit d’avoir effectué les 100 derniers km à pied ou à cheval, ou 200 km en vélo. Cela ne me concerne pas, puisque je n’ai pas de credencial, vu notre utilisation du camping-car.
Dans toute la ville déambulent randonneurs et pèlerins, un peu hagards et désorientés après ce long parcours qui vient de se terminer.

A 18h30, nous avons rendez-vous avec Anne et Jacques sous les arcades de l’hôtel de ville, en face de la cathédrale. Comme il se doit, il pleut. Nous observons le spectacle permanent de la praza de Obradoiro, avec ses touristes et marcheurs qui se photographient devant la cathédrale, ses pèlerins désargentés, ses mendiants et ses routards qui font cuire leur popote sous les arcades.


Quand arrivent Anne et Jacques, nous passons avec eux à l’Hôtel des Rois Catholiques qui offre le repas gratuit le matin, le midi et le soir aux dix premiers pèlerins qui se présentent munis de leur compostela. Effectivement, quelques pèlerins sans le sou, essentiellement des jeunes, attendent près d’une entrée latérale que les portes veuillent bien s’ouvrir.
Quant à nous, nous retournons tous les quatre au café Casino boire cidre, bière ou jus de fruit, en guise d’apéritif. Nous parcourons ensuite les ruelles du centre historique pour trouver un restaurant. Finalement, nous entrons dans un petit établissement qui ne paie pas de mine. Ambiance bruyante, lumière crue, patron pas aimable… Et pourtant nous allons nous régaler de fruits de mer, de coques, de calamars et de poulpes (« pulperías a feira », cuits dans un chaudron en cuivre), le tout arrosé d’un albariño.
On sort du restaurant à la nuit et sous la pluie. Nous disons adieu à nos amis à qui l’on promet de rester en contact une fois de retour en France. Viviane et moi rentrons en taxi au camping As Cancelas pour 22h10. C’est le clap de la fin. L’aventure est terminée…



Fin du GR 65/Camino francés, sentier de Saint-Jacques-de-Compostelle.



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